L'ANALYSE DE CYCLE DE VIE (ACV) DES SOURCES D'ÉNERGIE

ET LA PRODUCTION DE L'ÉLECTRICITÉ

par Edmond Pauly

L'analyse de cycle de vie est une méthode scientifique globale qui présente de nombreux avantages. Après avoir exposé deux domaines d'application de cette méthode, je vous résumerai les quatre résultats obtenus dans la production d'électricité et les quelques lacunes d'une telle analyse.

L'analyse de cycle de vie d'une source d'énergie permet d'évaluer les impacts environnementaux dans toutes les étapes du système énergétique: du site de production de la source d'énergie, des divers transports de cette source entre son extraction et sa consommation finale, et des centres de consommation de l'énergie utilisée.

Par exemple, le gaz naturel est souvent considéré comme une source d'énergie plus propre que les autres ressources. Or, l'extraction du gaz naturel et sa purification entraînent d'importantes émissions de bioxyde et de méthane. De plus, les longs gazoducs transcontinentaux libèrent de fréquentes fuites de gaz.

Enfin, les centrales thermiques alimentées par le gaz naturel produisent des émissions gazeuses toxiques.

Les analyses de cycle de vie des moyens de transport sont essentielles pour identifier les enjeux prioritaires. L'ACV des moyens de transport terrestre permet de mieux préciser le pourcentage cumulatif des émissions totales de gaz carbonique dans un pays: 27% du CO2 proviennent des carburants utilisés, 38% de la production des carburants réservés aux véhicules, 41% des activités de soutien au réseau routier (asphalte, métaux des ponts et lampadaires) et 45% de la demande supplémentaire en infrastructures (égouts, aqueducs, éclairage, distribution du carburant) causée par l'étalement urbain.

Les résultats des analyses de cycle de vie spécifiques à la production d'électricité sont quantifiables à partir des quatre éléments suivants:

  1. le rapport entre l'énergie livrée et l'énergie investie ou le ratio du retour de l'investissement.
  2. le territoire requis pour produire l'électricité (km2/TWh)
  3. les émissions de gaz à effet de serre (kt équivalent CO2/TWh)
  4. les émissions d'oxyde de soufre (t SO2/TWh)

Le premier élément met en évidence l'hydraulique comme le meilleur investissement comparativement à toutes les autres sources d'énergie.

Le second élément privilégie le nucléaire (0,4) et l'hydraulique (0,1) et rejette la biomasse (533) et partiellement l'hydraulique avec réservoir(152).

Le nucléaire (15), le soleil (13), le vent (9) et l'hydraulique au fil de l'eau (1) émettent le moins de gaz à effet de serre, alors que le charbon (974) et le mazout (778) en émettent le plus.. Enfin, les émissions de SO2 par térawatt-heure sont négligeables avec le nucléaire (3), le gaz naturel (4) et l'hydraulique (7) mais désastreuses pour le charbon (5274) et le mazout (8013).

De ces quatre résultats, c'est l'hydraulique surtout au fil de l"eau qui offre la meilleure position environnementale.

Cette déduction peut être trompeuse car l'analyse des cycles de vie est basée sur la comparaison de paramètres quantifiables séparément et non cumulativement c'est-à-dire un élément à la fois et non les quatre éléments additionnés ensemble.. De plus, ces analyses ne tiennent pas compte des échanges d'impacts environnementaux, de la disponibilité des ressources naturelles dans le monde, de leurs effets socio-culturels et économiques, et du niveau de service de chacune des options énergétiques.

La conclusion simple de prétendre que l'énergie hydraulique est le meilleur choix environnemental pour le Québec et le Canada doit être complétée par d'autres analyses de cycle de vie qui intègrent plusieurs paramètres économiques, sociaux et géographiques.

Par exemple, l'hydro-électricité qui prédomine au Québec (96 %) et un peu moins dans le Canada (64 %) n'endommage pas notre atmosphère, alors que nos voisins du sud sont nettement affectés par des combustibles polluants (70 %). Cependant à cause des vents dominants du sud-ouest, les gaz toxiques étatsuniens se déplacent vers les régions les plus peuplées du Canada en y déversant des précipitations acides.

Annexes:

  1. Retour sur investissement énergétique
  2. Territoire requis par les options énergétiques
  3. Émissions de gaz à effet de serre
  4. Émissions de SO2
  5. Hydro-Québec: prix et convergence énergétique
  6. Carte du réseau électrique au Québec (735 kV)

Sources: Documents de l'Hydro-Québec et un rapport de Camille Bélanger, ingénieure-consultante pour l'Hydro-Québec.